Huygens et l’invention de l’horloge à résonateur
Huygens et l’invention de l’horloge à résonateur, pp. 585- 89, La mesure du temps et de l'espace au XVIIe siècle , Dix-septième siècle, 2001/4 n° 213, p. 579-611.
Le problème est que le pendule ordinaire est si peu isochrone qu’il est inutilisable dans une horloge : un pendule correct pour une amplitude de 4o retarde de 15 secondes par jour si son amplitude augmente de 1o.
C’est en 1656 que Christiaan Huygens (1629-1695) coupla un pendule à l’horloge à engrenage alors en usage, lui donnant ainsi le régulateur qui lui manquait. L’idée de Riccioli trouvait ici son aboutissement, car le système d’affichage par engrenage fournissait le moyen de compter les oscillations. Deux innovations techniques portaient la marque du génie :
— tout d’abord le balancier était couplé à l’ancre qui bascule sur la roue d’échappement au moyen d’une « fourchette », pièce qui donnait suffisamment d’impulsion au pendule tout en le laissant suffisamment libre ;
— d’autre part, Huygens avait compris ce que Mersenne avait découvert, c’est-à- dire que les grandes et petites oscillations ne s’effectuent pas dans un même temps. Pour construire un chronomètre parfait il fallait d’une part déterminer la courbe tautochrone et d’autre part trouver le moyen de faire mouvoir le balancier le long de cette ligne et non sur la périphérie du cercle. La solution de Huy- gens repose sur le fait que la période est plus courte lorsque le fil est plus court. Si le fil pouvait d’une façon ou l’autre être raccourci au cours d’une oscillation, on pourrait donc compenser le défaut d’isochronisme et fabriquer un pendule qui, indépendamment de l’amplitude, exécuterait une oscillation complète toujours dans le même temps. C’est ce qu’on appelle un pendule tautochrone. Il expérimente des « joues » comme moyen de raccourcissement : des lamelles de cuivre placées de chaque côté du fil, près du point de suspension, et qui s’écartent graduellement de la direction verticale en se recourbant à mesure que l’on descend. Lorsque le pendule oscille, le fil vient se serrer contre l’une ou l’autre des lamelles sur laquelle il s’enroule, de sorte que sa longueur libre, qui détermine la période, diminue. Le poids au bout du fil ne décrit plus un arc de cercle à ce moment, mais la développante de la courbe de la lamelle. Christiaan Huygens ne connaissait pas la forme exacte des « joues » souhaitable pour la tautochronie. Pour sa première horloge, il avait dessiné une ligne passant par trois points judicieusement choisis, et il avait courbé les lamelles d’après son tracé.
Description de la première horloge conçue par Huygens
- Huygens et la France, Table ronde du CNRS, avant-propos de R. Taton, Paris, Vrin, 1982.