Christian Huyghens
"Il y a deux Huyghens : Constantin, le père, poète, homme d'État, diplomate, secrétaire des princes d'Orange, l'ami de Mersenne et de Descartes, qui lui écrivit de belles lettres; et son fils, Chistian, le savant, géometre, astronome et physicien, l'inventeur de l'horloge à pendule et le decouvreur du premier satellite de Saturne, l'ami des Perrault, le protégé de Colbert et l'un des organisations de notre Académie des sciences (de France)."
"Son génie avait éclaté dès l'enfance. Mis à l'étude en sa septième année par le plus intelligent des pères, et bénéficiant de la haute atmosphère spirituelle que celui-ci avait donnée à sa maison, Christian Huyghens avait d'abord fait parâitre la plus brillante facilité aux langues, à la géometrie, à la physique, à la mécanique. Il s'entendait aussi à la musique, qu'il aimait, jouant du théorbe et du luth, capable de noter des airs, et il décrivait et peignait joliment. A moins qu'il n'ait eu l'occasion de le voir, dans son enfance, chez son père, il n'est pas certain que Christian ait jamais rencontré Descartes, mais plusieurs passages de lettres de celui-ci donnent la preuve de l'estime où le philosophe tenait l'intelligence du jeune homme, au point même de solliciter son avis sur une question musicale qui l'intéressait. Malheureusement, Descartes devait mourir trop tôt pour que les relations avec lui pussent se poursuivre et se développer."
"Ses travaux en mathématique et en géometrie, ses fabrications de lentilles pour lunettes astronomiques, sa correspondance avec le père Mersenne, alors, selon le mot de Paul Valéry, le meilleur "agent de fermentation scientifique et de liaison entre les savants de différente religion", avait déjà rendu célèbre le jeune Huyghens, lorsqu'en juillet 1655 son père l'envoya à Paris se parfaire dans "la bonne et belle conversation".
"Il rencontre enfin Gassendi, le mathématicien Roberval, Jacques Du Puis, conservateur de la bibliothèque du roi. Entre temps, il va se faire recevoir docteur en droit à la faculté d'Angers,..."
"Mais, son père le réclamait à la Haye, et il dut partir,..."
"De retour au pays natal, Christian Huyghens allait entreprendre l'éclatante série des ses recherches et de ses découvertes. Il a vinght-six ans. Il trouve le satellite de Saturne, il invente l'horloge à pendule, résout à sa manière le problème des enjeux posé par Pascal, et concourt, sans prétendre au prix, au problème de la roulette, institué aussi par Pascal, qu'il regrettait de l'avoir pas vu lors de son voyage, mais avec lequel il correspond, et auquel il adresse, entre autres, une très belle lettre de déférente gratitude et de respectueuse affection, pour le remercier des compliments qu'il en a reçus."
"Il y reviendra (à Paris) en 1666, et cette fois pour s'y établir et y demeurer dix-sept ans, grâce à la faveur intelligente de Colbert, qui avait su attacher ce grand inventeur au service du roi, assurer par une importante pension ses moyens d'existence dans notre pays (la France), et qui lui confia en outre l'organisation et le règlement de la nouvelle Académie des sciences. L'histoire de ce séjour et des travaux qui illustrèrent est connue, et la liaison d'affectueuse amitié du Hollandais avec les Perrault, et le rôle excitant qu'il exerça sur les progrès de l'esprit scientifique."
Emile Henriot, Huyghens à Paris, Courrier Littéraire, journal : LE TEMPS, Paris 15-16 juillet 1935